Être au mois d’Août.
Plein été.
Soleil rayonnant.
Être légère et Vivante.
Aller chez le radiologue.
Une écho.
Pour un tout petit rien du tout.
Une petite boule sous la clavicule.
(en avoir une dans le dos, savoir que c’est bénin, un lipome… se savoir créative avec le gras. Assumer.)
Et puis, voir la tête du radiologue se tourner de droite à gauche et de gauche à droite.
Point de lipome.
Un ganglion.
- Hein ??? Pas de lipome ?? Un ganglion ! Mais non !
- Mais si. Vous avez été malade ?
Tourner la tête de droite à gauche et de gauche à droite : Non, pas malade.
- Eu de la fièvre ?
- Non et non.
- Reçu un coup ???
- Non, non et non…
- Vous avez déjà fait une mammographie ????
- Hein ????? Non, bien sûr que non ! Non, mais, ça ne va pas la tête, je suis jeune moi ! Plein mois d’août. C’est l’été chez moi.
- Nan, mais parce que vous arrivez à l’âge fatidique.
L’âge fatidique de quoi ? Il est marteau ce radiologue. Je suis à l’âge du mois Août, moi, l’âge où il y a plein soleil… Bon, allez, va pour la fin Août, puisque vous insistez et qu’on est le 27.
Mais en tous cas, pas à l’âge fatidique.
- Vous allez avoir 40 ans, c’est bien de commencer les mammo à cet âge là et vu que votre ganglion est proche de votre sein…
Prendre rendez-vous.
Sortir du cabinet.
Être passée de l’été à la fin de l’automne.
Sentir le poids des années sur ses épaules.
N’être plus seulement vivante. Être mortelle. Le savoir. Le sentir.
Se dire qu’on venait pour un p’tit gras…
Penser qu’on devrait être encore l’âge des marmots, pas à celui des mammo…
Comprendre qu’on ne l’a pas vu venir.
Qu’on n’a pas vu le temps passer.
Du tout.
Mais vraiment pas.
Savoir l’âge qu’on a.
Et savoir surtout qu’on a l’âge de ses seins.
14 jours à attendre.
14 jours à se dire que peut-être c’est dernière fois qu’on fait du patin à roulettes.
14 jours à penser que c’est peut-être la dernière fois qu’on accompagne les enfants à la rentrée des classes.
14 jours à se regarder droit dans les seins. Trouver paradoxal qu’on puisse mourir à cause de ceux-là même qui ont nourri 4 enfants.
14 jours à être vieille.
Mortellement vieille.
Essayer de positiver… et ne pas vraiment y arriver. Parce qu’on attend.
Et les jours passent comme des années. Des années qu’on se prend en plein dans la figure.
Aller au rendez-vous.
Se sentir tout petite dans la salle d’attente.
Se faire presser les seins entre des plaques froides.
- Attendez là sur le siège. On va analyser les clichés. Ne remettez le soutien-gorge… parfois on fait une écho aussi.
Se ratatiner sur le siège… compter les secondes.
Entendre : venez, c’est ici pour l’écho.
Se liquéfier. Littéralement. Complètement. Essayer de le cacher et ne pas y arriver vraiment.
Avoir peur. Vraiment peur.
Ne pas tordre le cou pour voir l’écran de l’écho, pour essayer de chercher un petit cœur bat. Dans cette écho là, y’a pas de petit cœur. Même le nôtre s’est arrêté.
Et enfin, entendre : je vous revois dans 3 ans.
Tout va bien.
Adorer ce radiologue.
Aimer énormément ses seins sains.
Sortir, légère.
Voir quelques nuages dans le ciel. Savoir que c’est bientôt l’automne.
Et se souvenir, que, l’automne est notre saison préférée… tâcher de bien vivre cette saison.
En attendant, faire des provisions de soleil.
Hé ! c'est dingue, pour la peine, je vous montre mes seins... je ne recule devant rien !
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(et puis, montrer ses seins, ses nichons, ses nibards, ses loches, c'est important)